
Si vous pensez qu’une série de bonnes nouvelles garantit la hausse d’un cours en bourse, méfiez-vous, car c’est un piège mental bien connu ! Il revêt le nom d’illusion de corrélation et il condamne fréquemment les investisseurs novices à vivre quelques émotions fortes dès leurs premiers pas en bourse.
Pourquoi notre esprit nous joue des tours ?
En 1976, les chercheurs David Hamilton et Robert Gifford ont mené une expérience révélatrice sur la façon dont nos cerveaux créent des liens imaginaires entre des faits qui n’en ont pas. Voici comment ils ont procédé :
1 – Deux groupes de taille différente :
26 personnes pour le groupe A
13 personnes pour le groupe B
2 – Des profils contrastés
Chaque participant s’est vu attribuer un métier, soit à connotation positive, soit négative.
Exemple : « je suis un voleur » ou « je suis employé de mairie ».
En maintenant la même proportion de métiers « positifs » et « négatifs » dans les deux groupes, ils ont obtenu :
Groupe A : 18 « voleurs » et 8 « employés de mairie »
Groupe B : 9 « voleurs » et 4 « employés de mairie »
Le ratio était donc identique : environ 70 % de « voleurs » dans chaque groupe.
3 – Le piège de l’illusion de corrélation :
Chaque participant devait estimer le nombre de « voleurs » dans chaque groupe, sans autre information que la taille des groupes.
Résultat ? Les participants surestimaient systématiquement la proportion de « voleurs » dans le groupe minoritaire, groupe B, associant sa petite taille à une plus grande concentration de comportements « négatifs ».
Ce phénomène, appelé corrélation illusoire, démontre que notre esprit peut aisément créer des liens trompeurs. Un biais cognitif qui, en investissement, peut vous conduire à voir des tendances ou des « signes » là où il n’y en a aucun.
Comment ce biais impacte-t-il vos décisions d’investissement ?
Les erreurs de perception sont omniprésentes en bourse ! Face au flux incessant d’informations – réseaux sociaux, analyses, tendances – vous risquez de voir des « signaux » qui confirment vos craintes ou renforcent vos espoirs… alors qu’il ne s’agit souvent que de grains de poussière dans un océan de données.
Dans un monde saturé d’informations financières, il est facile de se laisser emporter par des nouvelles sensationnalistes ou des analyses à court terme. Cette surcharge d’informations peut exacerber les biais cognitifs, tels que l’illusion de corrélation ou le biais de confirmation, et influencer nos décisions d’investissement de manière irrationnelle. Les gros titres sont souvent conçus pour capter notre attention, mais ils ne reflètent pas toujours la réalité sous-jacente des marchés.
Le cas de l’analyse technique
L’analyse technique, qui consiste à étudier les graphiques de prix et les volumes de transactions pour prédire les mouvements futurs des marchés financiers, a séduit de nombreux investisseurs grâce à son approche visuelle et à la promesse d’identifier des opportunités basées sur des schémas répétitifs et des indicateurs précis. Cependant, cette méthode n’est pas sans critiques et soulève des interrogations quant à sa véritable efficacité.
L’un des risques majeurs de l’analyse technique réside justement dans l’illusion de corrélation. Ce biais cognitif conduit les individus à percevoir une relation entre deux variables alors qu’il n’existe pas forcément de preuve systématique entre celles-ci. Dans le contexte de l’analyse technique, cela signifie que les analystes peuvent être tentés de voir des motifs ou des tendances là où il n’y en a pas, simplement parce qu’ils s’attendent à les trouver. Cela est généralement alimenté par des informations favorables ou défavorables qui semblent justifier la pertinence des motifs présentés. Cette tendance à établir des liens fictifs entre des événements ou des données peut mener à des décisions d’investissement hâtives et erronées.
Par exemple, un investisseur convaincu qu’un marché est haussier cherchera naturellement des signaux qui confirment son intuition, comme des formations de « têtes-épaules » ou des lignes de support et de résistance. Leur apparition lui permettra de valider sa théorie, car il aura la sensation de voir le marché haussier se dessiner sur ces indicateurs. Cette lecture, pas forcément inexacte, ne possède pourtant pas de liens explicites et vérifiables.
Le marché pourrait monter pour tout un tas d’autres raisons, et non à cause d’une résistance psychologique sur une ligne de support. Comment le savoir ? Nous ne pouvons pas, justement. Il est alors plus commode pour notre esprit que de se rattacher à de la vraisemblance, des corrélations plausibles, plutôt qu’à des incertitudes en cascade.
L’importance de la perspective à long terme et de l’étude fondamentale
Pour naviguer sereinement dans le monde de l’investissement, il est primordial de développer une perspective à long terme et de se concentrer sur l’étude fondamentale des actifs. Comme l’a souligné l’écrivain et investisseur Morgan Housel, auteur, chroniqueur au Wall Street Journal et associé du fonds d’investissement The Collaborative Fund :
« Un homme qui ne lit pas les journaux mais consacre son temps à lire des livres sur l’histoire et les principes fondamentaux sera toujours plus instruit et plus avisé que celui qui ne se concentre que sur les nouvelles quotidiennes. »
Cette citation met en lumière l’importance de comprendre les principes sous-jacents et les dynamiques à long terme des marchés financiers, plutôt que de se laisser influencer par les fluctuations quotidiennes et les nouvelles sensationnalistes. Une telle approche permet de développer une vision plus claire et plus rationnelle des investissements, en se basant sur des analyses solides et une compréhension approfondie des facteurs économiques et financiers.
En procédant ainsi, nous pouvons gager que nous repoussons les risques de se laisser berner par des corrélations artificielles.