Dans cet entretien, Pierre-Yves Gauthier d’AlphaValue, analyse les dynamiques des marchés financiers en ce début d’année. Alors qu’en Bourse les indices européens surperforment leurs homologues américains, plusieurs facteurs pourraient modifier cet équilibre fragile. L’essor fulgurant de DeepSeek, l’intelligence artificielle chinoise, la nervosité croissante autour du secteur technologique et le retour du protectionnisme américain sont autant d’éléments qui influencent les décisions des investisseurs.
Dans ce contexte incertain, quelles opportunités se dessinent et quels risques guettent les marchés ?
Les indices boursiers européens réalisent un départ en fanfare en 2025, surperformant leurs homologues américains, aussi bien le DAX que le CAC 40 et le STOXX 600 affichent des progressions notables. Cette tendance, inhabituelle sur les marchés, pourrait signaler un changement dans l’allocation des capitaux internationaux en Bourse.
Derrière cette embellie, plusieurs éléments expliquent la bonne tenue des marchés européens : une économie qui résiste mieux que prévu, des publications de résultats solides et des valorisations encore attractives comparées aux valeurs technologiques américaines. Mais cette dynamique peut-elle durer ?
L’un des séismes récents sur les bourses a été déclenché par DeepSeek, une entreprise chinoise spécialisée dans l’intelligence artificielle, qui a prouvé qu’elle pouvait rivaliser avec les géants américains tout en disposant de ressources bien plus modestes. L’annonce de ses avancées a suffi à déclencher une onde de choc : en une seule séance, la capitalisation boursière de Nvidia a chuté de 600 milliards de dollars.
Cette correction brutale met en lumière la vulnérabilité des valeurs technologiques en bourse, dont les valorisations ont été tirées par des anticipations très optimistes. Pour Pierre-Yves Gauthier, cette situation soulève une question clé : les investisseurs ont-ils sous-estimé la montée en puissance de la technologie chinoise et ses répercussions sur la domination américaine dans le secteur ?
Les tensions commerciales refont surface avec la perspective d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. L’ex-président américain a annoncé vouloir renforcer les barrières douanières visant le Mexique, le Canada et la Chine.
Si cette rhétorique protectionniste était attendue, ses conséquences pourraient être lourdes pour les entreprises européennes, notamment celles du luxe et de la pharmacie, qui réalisent une part importante de leur chiffre d’affaires aux États-Unis. Pierre-Yves Gauthier souligne que ces tensions risquent d’accroître la volatilité des marchés et de modifier les stratégies d’allocation des investisseurs internationaux.
Cependant, certains secteurs européens semblent mieux armés pour faire face à ce nouvel environnement.
Selon Pierre-Yves Gauthier, on observe une Europe à deux vitesses :
– Les banques européennes profitent de leur faible exposition aux risques américains et affichent une résilience notable.
– Le luxe et la pharmacie, très tournés vers l’international, subissent davantage les incertitudes géopolitiques et les tensions commerciales.
Malgré ces disparités, les premières publications de résultats sont globalement positives, avec 9 entreprises sur 10 dépassant les attentes. Pourtant, certaines déceptions, comme la chute de 5 % du titre UBS après l’annonce de nouvelles contraintes réglementaires, rappellent que la nervosité des marchés reste forte.
Dans ce contexte mouvant, quels sont les segments porteurs ?
– Santé, défense et logiciels : ces secteurs affichent une solide progression grâce à des fondamentaux robustes.
– Le luxe : bien que fragilisé par les tensions commerciales, il continue d’attirer les investisseurs.
– Mines et métaux : ils pourraient bénéficier indirectement de la montée des tensions commerciales.
– Automobile européenne : particulièrement vulnérable, le secteur subit les nouvelles politiques protectionnistes américaines.
Les turbulences actuelles rendent plus que jamais nécessaire une approche stratégique et sélective en matière d’investissement.
Si l’Europe affiche une dynamique encourageante, des risques persistent : la politique commerciale américaine, la montée en puissance des technologies chinoises et l’évolution des secteurs à forte valorisation restent des éléments à surveiller de près.
L’Europe peut-elle maintenir son avantage face aux secousses des marchés mondiaux ?